I.01 lost in the sea. (johanna+lauryn)

« Lost in the sea. »

Lorsque Johanna avait croisé des demi-dieux de la Colonie des Sang-mêlé, ils lui avaient à peu près tous dit la même chose, même si c’était formulé différemment. Elle se souvenait particulièrement d’un certain Damien dont le nom de famille était et restait imprononçable. Leurs discussions s’étaient souvent achevées en croisement de fer, dans le sens littéral du terme. Il lui rabâchait toujours les mêmes arguments, selon lesquels elle prétendait ne pas vouloir être un pion des dieux alors qu’elle était bien un de Gaïa. Il en était de même pour les autres membres du Camp, à vrai dire... Mais elle n’était pas d’accord. En toute honnêteté, rejoindre Cronos, puis Gaïa était la meilleure chose qui lui était arrivée. Elle n’avait plus besoin de rendre de comptes aux Dieux, ni même de les servir, les idolâtrer ou elle-ne-savait-quoi encore. Elle pouvait faire un peu tout ce qu’elle voulait. Quant au fait qu’elle était apparemment un pion de Gaïa, elle s’en moquait pas mal, tant qu’elle pouvait détruire ou renverser les dieux. Cela n’avait franchement pas d’importance... Remettre en cause son choix d’appartenir aux partisans ne provoquait chez elle que de l’indifférence, voire du mépris. Pour rien au monde, elle ne changerait de « camp », d’allégeance. Elle avait d’ailleurs beaucoup de mal à accepter les traîtres. Au moment où un demi-dieu autrefois « fidèle » quittait les rangs de Gaïa, elle le considérait comme mort et n’hésiterait pas à lui faire la peau. Quant aux traitres qui du jour au lendemain décidaient de revenir, elle ne les acceptait pas. Quelqu’un qui trahit une fois continuera à trahir. Pas de seconde chance. Pas avec elle, en tout cas...
Lauryn avait plutôt intérêt à être fidèle à Gaïa si elle rentrait dans les rangs. Et elle allait le faire, n’est-ce pas ? Elle n’aurait pas fait tout cela pour rien – et puis, les voix, les doutes, tout ça, ça jouaient un grand rôle. Elle était à deux doigts d’être recrutée. Une phrase de Johanna, et le tour était joué... L’adolescente ne pouvait ni refuser ni faire marche arrière. Si cela arrivait... Peut-être que Johanna insisterait. Peut-être qu’elle lui balancerait l’argument que Gaïa ne viendrait pas dans sa tête si elle ne pensait pas qu’elle était faite pour accomplir de grandes choses, patati patata. Généralement, le pouvoir était un met de choix chez les humains, ou demi-dieux, peu d’entre eux échappaient à la règle. Gloire, argent, pouvoir, vous savez, ce genre de choses. Et puis, pour les plus réticents, si jamais Lauryn en faisait partie, Johanna lui dirait que Gaïa pouvait exaucer tous ses vœux, ou quelque chose comme ça... même si ce n’était pas toujours vrai – il ne fallait pas abuser des bonnes choses, tout de même ! Elle lui parlerait de rêves, d’ambitions, de beauuuux cadeaux, récompenses, bref, ces trucs-là.
Mais Lauryn n’allait pas hésiter... pas après tout ce bout de chemin.
Johanna continua de l’observer d’un œil avisé, les coudes toujours appuyés sur le dossier du canapé en face de la demoiselle. Celle-ci semblait réfléchir aux propos qu’elle venait de lui lancer avec un mélange d’amusement et de persuasion. Oui, réfléchis, ne te lance pas dans quelque chose que tu risques de quitter dans une semaine. La vie chez les partisans n’était pas rose tous les jours, il fallait le dire. Pour parvenir à un rang en-dessous de celui de Général de l’armée de Gaïa, la fille d’Arès avait du trimer et essuyer quelques – nombreuses – défaites. Et ni Cronos ni Gaïa n’étaient cléments lorsqu’il s’agissait d’échecs et de déceptions. D’ailleurs, elle se demandait parfois comment cet imbécile d’Arthur-le-mouton avait décroché le plus haut rang chez les partisans, alors qu’il ne faisait pas grand-chose... Il n’était même pas du côté de Cronos il y a quelques années ! N’importe quoi ! Mais Gaïa devait avoir ses chouchous et, de toute façon, ce n’était plus qu’une question de temps avant qu’Arthur ne disparaisse – et franchement, Johanna se portait volontaire pour sauvagement l’assassiner et lui voler sa place. Cela dit, en attendant que cela arrive, elle prenait son mal en patience et tolérait en grognant son grade de sous-général.
La brune eut un léger soupir et se redressa, ennuyée de rester dans la même position sans rien faire. Elle laissait cependant tout le temps qu’il fallait à Lauryn pour répondre – car, au risque de nous répéter, ce n’était pas une décision à prendre à la légère. Et quitte à devenir son entraîneuse perso ou son guide au sein des partisans, mieux valait pour elle de ne pas effrayer la fille d’Aphrodite – ce serait vraiment trop bête.
Mais la fille d’Aphrodite en question ne semblait pas reculer. Pour le confirmer, elle répondit enfin.

« Je pense que vous êtes la mieux placée pour me faire venir chez vous, je crois, non ? Est-ce que Gaïa est un genre de déesse capable de... tout ? »

Un nouveau sourire au teint satisfait se glissa sur les lèvres de Johanna. C’était gagné. Lauryn n’attendait plus que quelque chose en retour de son entrée chez les partisans. Et elle pouvait recevoir tellement de choses... Ses rêves les plus fous, ses désirs cachés, ses peurs, ... Johanna repassa devant le fauteuil et déclara doucement, toute trace de mépris ou d’arrogance envolée.

« Tout ce que tu veux... Argent... Protection. Même la protection de quelqu’un que tu aimes ! » Elle songea un instant à Layton, sans vraiment le vouloir, puis reprit, toujours sur le même ton. « Enfin, il y a tant de choses à citer mais, à moins vraiment que ce ne soit quelque chose de très, très irréel... oui, Elle est capable de tout. Si tu veux quelque... tu l’auras. »

Son petit sourire au coin des lèvres, elle fit quelques pas dans la pièce, se disant que dans deux secondes, Lauryn les rejoignait et quittait définitivement – elle l’espérait – la Colonie des Sang-mêlé. Elle quittait tout, ses amis de là-bas principalement, sa fidélité aux dieux. Elle était une partisane de Gaïa. La fille d’Arès se tourna vers la blonde – brune ? – avec un léger rire.

« Dois-je te souhaiter la bienvenue parmi nous ou... ? »